Moulins à vent Nikithianos Plateau de Lassithi Crète

Lassithi break

© Adobe Stock/Gatsi

Moulins à vent Nikithianos Plateau de Lassithi Crète

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Lassithi break

La Crète est victime d’un malentendu. Parce qu’on la résume trop vite à ses côtes, ses stations balnéaires et leurs resorts, on la pense uniquement tournée vers la mer. Alors qu’en réalité, elle a souvent la tête dans les montagnes. Celles qui protègent le plateau du Lassithi, par exemple, cet immense jardin où les moulins poussent en plus grand nombre que les arbres et les habitants cultivent des fruits, des légumes et… l’authenticité.

Un coup d’œil dans le rétro pour apercevoir une dernière fois Malia et la mer et vous vous concentrez sur la route, devant vous. Quelques minutes plus tard, voilà que la pente augmente, que la voie se fait plus étroite et que les virages s’enchaînent. Votre ascension du massif du Dikti a vraiment commencé. Coupez donc la climatisation et baissez la vitre ; vous sentez cet air frais, le parfum de la nature ?

Un village s’annonce : Krasi. Qu’avez-vous lu sur l’endroit ? Ça va vous revenir… Ah oui ! Il fut la villégiature de Níkos Kazantzákis, l’un des plus grands écrivains grecs, l’auteur d’Alexis Zorba, le roman qui a inspiré Zorba le Grec, le film pour lequel on littéralement inventé le sirtaki. Quoi d’autre ? Il abrite le plus vieux platane de l’île et l’un des plus anciens d’Europe. Il a mille ans révolus ; certains prétendent même qu’il en a le double. Avec ses vingt-quatre mètres de circonférence, il impressionne. Dommage qu’un coup de vent malheureux l’ait privé récemment d’une partie de sa ramure. Vous arrêter un instant ? Pourquoi pas. Après tout, qu’est qui vous en empêche ? Le temps ? Oubliez le temps ; il est derrière vous. Pour une fois que vous êtes en passe de lui échapper…

Du cœur et des ailes

Vous poursuivez votre chemin et passez Kera, un hameau connu de tous les Crétois grâce à l’icône miraculeuse de son monastère : la vierge Marie Kardiotíssa, la Vierge Marie « du cœur », un nom qu’elle doit à son regard intensément maternel sur l’enfant Jésus. C’est hélas une copie, l’original ayant été volé par les Vénitiens il y a de cela six cents ans. Une perte incommensurable pour les îliens puisque, selon la croyance locale, cette icône virginale les protégeait, les guérissait et, dans sa grande mansuétude, pleurait de vraies larmes quand leur île souffrait.

La route serpente plus que jamais et soudain, à la sortie d’un virage, sur votre gauche, une vue splendide sur la vallée en contrebas et la mer Égée. Un ultime regard, un dernier adieu au Grand Bleu, encore quelques lacets et vous voilà enfin au col de Seli Ambelou, à 900 mètres d’altitude, prêt(e) à faire la bascule dans un autre monde. En surplomb de la route, une grosse vingtaine de moulins en pierres sèches gardent la crête. Une armée en position, parfaitement alignée. Mais une armée défaite par on ne sait quel Don Quichotte. Les murs sont effondrés et les roues envolées. Il est toutefois quelques spécimens intacts ou presque ; l’un d’eux à même ses ailes. Ceux-là vous donnent une idée de ce que devait être l’endroit il y a moins d’un siècle quand le meltem, le vent du Nord, gonflait encore les toiles et actionnait ainsi les meules de ce qui était la meunerie la plus importante de la région.

Col de Seli Ambelou Lassithi Crète

© Unsplash/Joshua Kettle

Une terre nourricière

Des moulins, il y en bien d’autres sur le plateau du Lassithi, au point qu’on le surnomme « le Plateau aux mille moulins ». Un chiffre bien en deçà de la réalité : jusque dans les années soixante, on en dénombrait dix mille, pas moins. Quelques-uns ont eu du grain à moudre dans leur jeunesse. Mais l’immense majorité de ses moulins ne sont jamais que de simples éoliennes qui, jusqu’à la généralisation des motopompes, ramenaient l’eau du sous-sol pour irriguer les champs, à la saison sèche.

C’est que l’eau ne manque pas dans cette partie de l’île (du moins, jusqu'à ce que le réchauffement climatique ne commence à faire son effet, ici comme ailleurs). Chaque printemps, cette vaste cuvette reçoit en effet les eaux des torrents formés par la fonte des neiges des montagnes alentours. Pendant longtemps, les autochtones ont maudit ce phénomène, leurs champs se transformant au retour des beaux jours en d'infâmes bourbiers. Mais en un rien de temps, vers la fin du XVe siècle, la situation a changé du tout au tout : les marécages ont disparu et la région tout entière s'est métamorphosée en corne d’abondance. La vierge Marie Kardiotíssa n’y est pour rien. Le mérite en revient aux Vénitiens qui occupaient la Crète depuis 1204. Les Lassithiotes leur doivent leurs liniès, ces canaux d’irrigation qui, quadrillant l'ensemble du plateau, drainent sans relâche les terres, les rendant fertiles et faciles à cultiver.

Le système mis en place par la Sérénissime a transformé le quotidien des paysans du cru qui ont enfin vécu de la nature après l'avoir subie si longtemps. Cela n'a pas suffi cependant à effacer leur rancune pour la puissance dominante. Les îliens seraient-ils des ingrats ? Non, ils ont tout simplement de la mémoire ! Ils n'ont jamais oublié le sort qu'il leur a été réservé quand, deux siècles plus tôt, refusant son asservissement, le peuple crétois a tenté de renvoyer l'Occupant dans sa lagune. Principal foyer de cette insurrection, le plateau du Lassithi a connu la plus féroce des répressions. En 1263, les troupes du Doge évacuent tous ses habitants, abattent leurs arbres fruitiers et, dans la foulée, interdisent la culture et l’élevage dans toute la contrée, menaçant de mort ou de mutilation tous les contrevenants. Ça ne rigole pas 

Vous savez ce que l'on dit, il n'y a que les imbéciles qui ne changent pas d'avis. Les Vénitiens ont fini par réparer leur erreur et, cinq siècles plus tard, une partie de leurs liniès contribue encore à la bonne santé de l'agriculture locale. Ce terroir montagnard est d'ailleurs l'un des principaux garde-manger de la Crète, garnissant les étals de ses tomates, poivrons, potirons, haricots, courgettes, pommes, pêches, cerises, amandes, olives, raisins… Mais sa grande spécialité reste la pomme de terre avec une production dépassant les 100 000 tonnes. La qualité des Spunta, Agria, Liseta, Marfona et autres variétés locales est telle que la patate lassithiote se vend désormais dans toute l'Europe. Au point que l’île doit importer désormais des pommes de terre d’Égypte pour satisfaire la demande indigène. Le monde est dingue ! 

Potager éolienne plateau du Lassithi Crète

© Pixabay/Petert2

Rebelles, mais accueillants

Les Vénitiens ne sont pas les seuls à qui les Lassithiotes ont donné du fil à retordre. Difficile d’accès, la région a toujours été le fief des insurgés de tous poils. Débarqués en 1669, les Ottomans ont tenté de les mettre au pas en adoptant la même technique radicale que Venise, rasant les villages et déportant leurs populations. Et comme leurs prédécesseurs, ils ont finalement rendu la terre aux paysans pour s'éviter une famine. Durant la Seconde guerre mondiale, refusant l’occupation allemande, de nombreux « maquisards » crétois ont également trouvé refuge sur le plateau du Lassithi, multipliant les caches d’armes et les refuges dans les grottes des montagnes environnantes, imitant ainsi le premier résistant de l’histoire : Zeus, fils de Cronos, celui qui mena la révolte contre son tyran de père. C’est en effet l’une des cavernes du massif du Dikti qui a abrité le dieu des dieux olympiens à sa naissance.

Située à une vingtaine de minutes de marche du village de Psychró, elle est visitée par 200 000 curieux chaque année (lire ci-contre). Une forte fréquentation qui fait figure d’exception dans une contrée qui reste attachée à sa tranquillité. Un goût pour la routine qui n’interdit ni le partage ni l’hospitalité. À Agios Georgios, par exemple, on a transformé une ancienne école en musée pour témoigner des savoir-faire, de l’histoire et des traditions de la région. À Tzermiádo, chef-lieu du Lassithi, les tavernes comme Café Kronio (on y parle français !), Kourites ou Halavro Kouzina, ont quelque chose de la tour de Babel à l’heure du repas. Les gens du coin voisinent volontiers avec la clientèle de passage et, même si l’anglais est parfois maladroit, les langues se délient bien vite après un verre de vin du pays ou une bouchée d’agneau aux herbes. Une convivialité qui n’est pas le seul atout de ces tables villageoises : leur cuisine est typique, leurs produits sont frais, leurs plats délicieux et la note qui conclut ce festin est bien plus douce que le slot de raki qui l’accompagne invariablement. Une autre bonne raison de franchir le col de Seli Ambelou, non ?

Diktaion Antron Psychró grotte de Zeus naissance de Zeus Amalthée

Zeus, l'enfant
du pays

C’est une question qui n’est pas prête d’être tranchée : où est né Zeus ? « En Arcadie, dans le Péloponnèse, sur le mont Lykaion », prétendent les Grecs du Continent. « À Naxos, sur le mont Zas, près du village de Filoti », entend-on dans les Cyclades. « Chez nous, forcément », revendiquent unanimement les Crétois, même si le sujet divise l’Ouest et l’Est de l'île mieux que le Mur ne séparait les deux Allemagne. Le camp occidental ne jure, en effet, que par le mont Ida, le plus haut sommet insulaire avec ses 2 456 mètres, tandis que, pour la partie orientale, l’affaire ne fait pas un pli : le berceau du dieu des dieux se situe sur les flancs du mont Dikti.

Une chose est certaine : Zeus est né dans une grotte. Une venue au monde pour le moins discrète pour celui qui allait devenir le plus puissant des dieux de l’Olympe. Mais bon, après tout, ce n’est pas plus mal qu’une étable abritant un bœuf et un âne ! Si Rhea, la maman, a préféré l’inconfort d’une caverne à une chambre single en clinique privée, c’est pour garder son enfant de la voracité de son époux, Cronos, le roi des Titans. Celui-ci avait déjà gobé tout cru leurs cinq premiers marmots, convaincu d’échapper ainsi à la prophétie de ses parents — Ouranos (le Ciel nocturne étoilé) et Gaia (la Terre) — qui lui avaient annoncé que l’un de ses enfants lui ravirait son trône. Sans la ruse de sa femme qui, au lieu du nouveau né, lui apporta une grosse pierre entourée de langes, l’ogre n’aurait fait qu’une bouchée du sixième de ses rejetons. Au lieu de quoi, le rescapé a grandi dans le plus grand secret grâce à la chèvre Amalthée qui l’a nourri de son lait et aux Curètes, de jeunes guerriers qui, à l’entrée de la grotte, dansaient et frappaient leurs boucliers de leurs lances afin de faire un raffut de tous les diables et couvrir ainsi les pleurs du divin enfant. Devenu adulte, Zeus a libéré ses aînés des entrailles paternelles, triomphé des Titans et exilé son odieux daron dans le Tartare, au plus profond des Enfers.

Bien que toute cette histoire relève de croyances qui n’ont plus cours aujourd’hui, elle entraîne chaque année des centaines de milliers de personnes sur les flancs du Dikti, du côté du village de Psychró. Ces spéléologues d’un jour s’acquittent d’une somme rondelette (15 euros depuis le printemps 2025) auprès du Ministère de la Culture grec qui gère le site, avant de descendre les deux cents marches (qu’il leur faudra remonter, évidemment) menant à l’antre du dieu. Longue de plus de 80 mètres, large de la moitié et haute de 14 mètres au maximum, la chambre principale de la grotte abrite un petit lac souterrain rempli toute l’année. Une mise en bouche avant le clou du spectacle : « le manteau de Zeus », un ensemble de piliers, de stalactites et de stalagmites qui tapisse la quasi totalité de la cavité. Mises en valeur par un jeu de lumières alternant, d’une paroi à l’autre, le rouge, le jaune et le vert, ces concrétions forment un paysage onirique, pour ne pas dire sacré, qui, concédons-le, est tout à fait raccord avec le mythe olympien.

Le site vaut-il une visite ? Oui, sans hésiter, si vous êtes féru de mythologie ou sensible à la beauté de la nature. Dans le cas contraire, vous risquez d’être déçu(e). Le Diktaion Antron, ce n’est quand même pas Padignac, le superbe gouffre périgourdin ! En plus de ça, le chemin qui le relie la grotte à Psychró est plutôt rude, surtout sous le soleil estival. Ça grimpe sec ! Il existe cependant une solution pour ceux que l’ascension effraie : l’âne. Pour arrondir leurs fins de mois, certains paysans lassithiotes vous propose de faire le trajet sur le dos de leur animal, moyennant une quinzaine d’euros l’aller-retour. Les baudets en souffrent-ils ? Par le passé, oui. Sans soins, sans ombre, sans eau, sans répit, ces quadrupèdes illustraient parfaitement l'expression « bête de somme ». Mais sous la pression conjuguée des associations de défense des animaux et des autorités du pays, leurs propriétaires, moins têtus que leurs bourriques, ont fait de sérieux efforts pour améliorer le bien-être de l’animal : harnachements de meilleure qualité, mise en place de points d’eau et de tournées vétérinaires, respect des pauses, des rotations et de la réglementation imposant un seul cavalier de moins de cent kilos par tête… Des initiatives louables qui vont dans le bon sens : celui du maintien de l’âne dans le paysage crétois. L’espèce est en effet menacée de disparition sur l’île comme dans toute le pays. En 1955, près de six cent mille équidés broutaient dans les campagnes grecques. Soixante-dix ans plus tard, ils sont moins de quinze mille.

La Crète est victime d’un malentendu. Parce qu’on la résume trop vite à ses côtes, ses stations balnéaires et leurs resorts, on la pense uniquement tournée vers la mer. Alors qu’en réalité, elle a souvent la tête dans les montagnes. Celles qui protègent le plateau du Lassithi, par exemple, cet immense jardin où les moulins poussent en plus grand nombre que les arbres et les habitants cultivent des fruits, des légumes et… l’authenticité.

Un coup d’œil dans le rétro pour apercevoir une dernière fois Malia et la mer et vous vous concentrez sur la route, devant vous. Quelques minutes plus tard, voilà que la pente augmente, que la voie se fait plus étroite et que les virages s’enchaînent. Votre ascension du massif du Dikti a vraiment commencé. Coupez donc la climatisation et baissez la vitre ; vous sentez cet air frais, le parfum de la nature ?

Un village s’annonce : Krasi. Qu’avez-vous lu sur l’endroit ? Ça va vous revenir… Ah oui ! Il fut la villégiature de Níkos Kazantzákis, l’un des plus grands écrivains grecs, l’auteur d’Alexis Zorba, le roman qui a inspiré Zorba le Grec, le film pour lequel on littéralement inventé le sirtaki. Quoi d’autre ? Il abrite le plus vieux platane de l’île et l’un des plus anciens d’Europe. Il a mille ans révolus ; certains prétendent même qu’il en a le double. Avec ses vingt-quatre mètres de circonférence, il impressionne. Dommage qu’un coup de vent malheureux l’ait privé récemment d’une partie de sa ramure. Vous arrêter un instant ? Pourquoi pas. Après tout, qu’est qui vous en empêche ? Le temps ? Oubliez le temps ; il est derrière vous. Pour une fois que vous êtes en passe de lui échapper…

Du cœur et des ailes

Vous poursuivez votre chemin et passez Kera, un hameau connu de tous les Crétois grâce à l’icône miraculeuse de son monastère : la vierge Marie Kardiotíssa, la Vierge Marie « du cœur », un nom qu’elle doit à son regard intensément maternel sur l’enfant Jésus. C’est hélas une copie, l’original ayant été volé par les Vénitiens il y a de cela six cents ans. Une perte incommensurable pour les îliens puisque, selon la croyance locale, cette icône virginale les protégeait, les guérissait et, dans sa grande mansuétude, pleurait de vraies larmes quand leur île souffrait. La route serpente plus que jamais et soudain, à la sortie d’un virage, sur votre gauche, une vue splendide sur la vallée en contrebas et la mer Égée.

Un ultime regard, un dernier adieu au Grand Bleu, encore quelques lacets et vous voilà enfin au col de Seli Ambelou, à 900 mètres d’altitude, prêt(e) à faire la bascule dans un autre monde. Il n’y pas le moindre village à l’horizon et, pourtant, une grosse vingtaine de moulins en pierres sèches gardent la crête. Une armée en position, parfaitement alignée. Mais une armée défaite par on ne sait quel Don Quichotte. Les murs sont effondrés et les roues envolées. Il est toutefois quelques spécimens intacts ou presque ; l’un d’eux à même ses ailes. Ceux-là vous donnent une idée de ce que devait être l’endroit il y a moins d’un siècle quand le meltem, le vent du Nord, gonflait encore les toiles et actionnait ainsi les meules de ce qui était la meunerie la plus importante de la région.

bateau corsaire océan Indien île Maurice

© Unsplash/Joshua Kettle

Une terre nourricière

Des moulins, il y en bien d’autres sur le plateau du Lassithi, au point qu’on le surnomme « le Plateau aux mille moulins ». Un chiffre bien en deçà de la réalité : jusque dans les années soixante, on en dénombrait dix mille, pas moins. Quelques-uns ont eu du grain à moudre dans leur jeunesse. Mais l’immense majorité de ses moulins ne sont jamais que de simples éoliennes qui, jusqu’à la généralisation des motopompes, ramenaient l’eau du sous-sol pour irriguer les champs, à la saison sèche.

C’est que l’eau ne manque pas dans cette partie de l’île (du moins, jusqu'à ce que le réchauffement climatique ne commence à faire son effet, ici comme ailleurs). Chaque printemps, cette vaste cuvette reçoit en effet les eaux des torrents formés par la fonte des neiges des montagnes alentours. Pendant longtemps, les autochtones ont maudit ce phénomène, leurs champs se transformant au retour des beaux jours en d'infâmes bourbiers. Mais en un rien de temps, vers la fin du XVe siècle, la situation a changé du tout au tout : les marécages ont disparu et la région tout entière s'est métamorphosée en corne d’abondance. La vierge Marie Kardiotíssa n’y est pour rien. Le mérite en revient aux Vénitiens qui occupaient la Crète depuis 1204. Les Lassithiotes leur doivent leurs liniès, ces canaux d’irrigation qui, quadrillant l'ensemble du plateau, drainent sans relâche les terres, les rendant fertiles et faciles à cultiver.

Le système mis en place par la Sérénissime a transformé le quotidien des paysans du cru qui ont enfin vécu de la nature après l'avoir subie si longtemps. Cela n'a pas suffi cependant à effacer leur rancune pour la puissance dominante. Les îliens seraient-ils des ingrats ? Non, ils ont tout simplement de la mémoire ! Ils n'ont jamais oublié le sort qu'il leur a été réservé quand, deux siècles plus tôt, refusant son asservissement, le peuple crétois a tenté de renvoyer l'Occupant dans sa lagune. Principal foyer de cette insurrection, le plateau du Lassithi a connu la plus féroce des répressions. En 1263, les troupes du Doge évacuent tous ses habitants, abattent leurs arbres fruitiers et, dans la foulée, interdisent la culture et l’élevage dans toute la contrée, menaçant de mort ou de mutilation tous les contrevenants. Ça ne rigole pas 

Vous savez ce que l'on dit, il n'y a que les imbéciles qui ne changent pas d'avis. Les Vénitiens ont fini par réparer leur erreur et, cinq siècles plus tard, une partie de leurs liniès contribue encore à la bonne santé de l'agriculture locale. Ce terroir montagnard est d'ailleurs l'un des principaux garde-manger de la Crète, garnissant les étals de ses tomates, poivrons, potirons, haricots, courgettes, pommes, pêches, cerises, amandes, olives, raisins… Mais sa grande spécialité reste la pomme de terre avec une production dépassant les 100 000 tonnes. La qualité des Spunta, Agria, Liseta, Marfona et autres variétés locales est telle que la patate lassithiote se vend désormais dans toute l'Europe. Au point que l’île doit importer désormais des pommes de terre d’Égypte pour satisfaire la demande indigène. Le monde est dingue !

Potager éolienne Plateau de Lassithi Crète

© Pixabay/Petert2

Rebelles, mais accueillants

Les Vénitiens ne sont pas les seuls à qui les Lassithiotes ont donné du fil à retordre. Difficile d’accès, la région a toujours été le fief des insurgés de tous poils. Débarqués en 1669, les Ottomans ont tenté de les mettre au pas en adoptant la même technique radicale que Venise, rasant les villages et déportant leurs populations. Et comme leurs prédécesseurs, ils ont finalement rendu la terre aux paysans pour s'éviter une famine.

Durant la Seconde guerre mondiale, refusant l’occupation allemande, de nombreux « maquisards » crétois ont également trouvé refuge sur le plateau du Lassithi, multipliant les caches d’armes et les refuges dans les grottes des montagnes environnantes, imitant ainsi le premier résistant de l’histoire : Zeus, fils de Cronos, celui qui mena la révolte contre son tyran de père. C’est en effet l’une des cavernes du massif du Dikti qui a abrité le dieu des dieux olympiens à sa naissance.

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Artisan maquette de bateau île Maurice

© Pixabay/Ivana Tomášková

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